Notre ami Fred Forest créée l’événement cet été à Beaubourg !
Le musée parisien propose du 12 juillet au 28 août 2017, en accès libre, une grande exposition dédiée à notre ami Fred Forest, qualifié d’homme média n°1 et considéré comme un des pères fondateurs de l’art vidéo, aux côtés de Nam June Paik et de Andy Warhol, autour du thème du territoire.
L’exposition ouvre sur son Territoire du mètre carré artistique datant de 1977 (40 ans cette année, tout comme le centre Pompidou) et présente ses actions les plus emblématiques comme Space Médias, La Maison de vos Rêves ou Le Blanc envahit la Ville.
Le dispositif, entre espace réel et imaginaire, présente pour la première fois une sélection de documents d’archives et d’œuvres inédites.
Découvrez cet artiste ingénieux et, comme le présente le centre Pompidou, un « parcours d’artiste autodidacte mené hors des institutions : 40 ans d’agitation et d’engagement ! »
Vernissage ce mardi 11 juillet 2017 à partir de 18h00, Forum niveau -1 du centre Pompidou.
Allez-y, vous rencontrerez une légende.
Exposition de Fred Forest à Beaubourg – À lire ailleurs
• Présentation de l’exposition sur le site du centre Pompidou
• Fred Forest sur le site Art media Agency
Fred Forest : demain aux enchères, bientôt à Beaubourg ?
Propos recueillis chez l’artiste en 2014
Fred Forest est le pionnier de l’art vidéo et de l’art numérique en France. La Fondation Cartier lui a dédié une Soirée Nomade en décembre dernier et il est actuellement en pourparlers avec Beaubourg pour la planification d’une exposition qui lui serait consacrée.
Omniprésent sur le web, maniant comme personne les ficelles de la communication passée dans l’ère du numérique, cet artiste omnimédia a su, bien avant la naissance de l’Internet et des réseaux sociaux, exploiter et faire entrer les technologies de son temps dans le champ de la création artistique en concevant notamment des oeuvres participatives – qu’on qualifierait aujourd’hui d’oeuvres 2.0 – à chaque fois source pour le public de questionnement… et d’une certaine forme de délectation.
Il y a près de 20 ans, Fred Forest proposait – une première mondiale – une oeuvre immatérielle aux enchères (Parcelle-Réseau). Demain, ce sont deux oeuvres de l’artiste qualifié d’homme-média n°1 qui passeront en vente à Drouot, lors de la 1ère vente aux enchères d’art vidéo organisée en France, sous le marteau de Maître Wapler.
Une belle occasion pour échanger avec cet homme combatif, pétillant d’humour et d’intelligence, à la bio impressionnante et qui bouillonne de projets multimédia, entre une émission TV, une nouvelle performance au MOMA, un livre, la participation à une grande exposition du ZKM qui débutera en Allemagne pour atterrir au Brésil et bien sûr, on l’espère pour bientôt, son exposition à Beaubourg.
Deux oeuvres dans la 1ère vente aux enchères #artvidéo
« Mes deux oeuvres dans la prochaine vente aux enchères d’art vidéo sont une provocation, pour questionner ce qui fait les prix dans le marché. La première (Le vase brisé – 1986) est mise à prix à 1 EUR et la seconde (« Les gestes du coiffeur » – 1972) à 100 000 EUR !
L’expert, Arnaud Brument, a très bien réagi. D’autres m’auraient dit on ne peut pas, etc. Et Wapler, le commissaire-priseur, je le connais de longue date : il m’a vendu une machine à écrire lorsqu’il était jeune commissaire-priseur. (rires) Ils sont en tous cas enchantés que je participe à la vente, même si je ne sais pas vraiment ce que ça donnera. »
Une exposition Fred Forest au centre Pompidou ?
« Mes rapports avec Beaubourg ont toujours été compliqués.
Je ne suis pas le seul à réclamer cette exposition et à estimer que j’en ai la pleine légitimité. Paul Ardenne lui-même, dans un article d’ArtPress faisant suite à mon expo au CAD (Centre des Arts) d’Enghien-les-Bains, concluait en posant la question : « Quand verrons-nous Fred Forest au Centre Pompidou ? » C’est une question que les responsables de cet établissement ne peuvent plus éluder, compte tenu de ma notoriété acquise à l’étranger, notamment au Brésil, et aux États-Unis ces dernières années.
Aux USA, après un bras de fer – une fois de plus – pour obtenir une résidence à New York avec l’institution qui les accorde, j’en suis finalement sorti vainqueur. Il faut savoir que cinq universitaires américaines font depuis des PhD sur mon travail, et que deux d’entres-elles ont déjà déposé un projet d’exposition au Centre Pompidou et dans des musées américains… Un plan B est donc assuré ! Les conservateurs français auraient belle figure de me voir consacré par des musées américains si jamais ils restaient obstinément fermés à ce qui relève maintenant de l’évidence. Après quarante années de bons et loyaux services et une production que personne ne peut maintenant plus contester, les choses se précipitent pour une reconnaissance que j’envisage désormais sereinement.
Voilà mes rapports avec Beaubourg. Toute ma vie a été un combat, j’ai perdu une énergie… Mais d’autre part je pense que ça a nourri mon travail. J’attends désormais un rendez-vous, et cette exposition ! »
De nombreux autres projets… multimédia
• Une nouvelle performance au MOMA
« J’ai également un projet pour le mois de mai 2014, une performance sauvage au MOMA.
En quoi va-t-elle consister ? Quand je suis intervenu pour la première, les vigiles m’ont menacé d’appeler la police de New York si je persistais. Et la police de New York, elle ne plaisante pas. Mais moi, là ou je les ai feintés, c’est que l’oeuvre que je faisais, que j’ai annoncée comme telle, c’était justement la discussion avec eux !
Pour la prochaine, l’idée est de questionner le statut même de la performance. Je vais annoncer la performance au MOMA, ils vont certainement m’attendre… et je ne ferai rien du tout. Je serai un simple visiteur, je vais me balader et il y aura quinze personnes qui vont me photographier, les photos étant autorisées. Je ne sais pas ce qui va arriver : vont-ils quand-même intervenir ? »
• Une participation à l’exposition de Wilhelm Flusser
« Le ZKM, la section la plus avancée pour l’art technologique en Europe, installé à Karlsruhe, organise une grande exposition sur Wilhelm Flusser, considéré comme le philosophe de la photo et des médias en Allemagne.
Ce type-là, qui n’est pas connu en France, et bien j’ai eu la chance de travailler vingt ans avec lui ! Ma grande chance c’est d’avoir rencontré, quand je suis rentré d’Algérie, des gens qui m’ont nourri intellectuellement.
Je suis donc un des artistes charismatiques de cette exposition, qui sera présentée au ZKM, partira ensuite pour l’académie de Berlin puis au musée d’art contemporain (MAC) de Sao Paulo. »
• Une émission de télévision
« En ce moment je travaille sur une émission TV. Je recherche dans les équipes de télévision les gens qui font eux-mêmes de la recherche sur les nouvelles tendances pour la leur proposer. Mais je dois déposer le projet pour qu’on ne me le pique pas ! »
• La publication d’un livre
« J’ai également écrit un livre. Pour l’instant je n’ai pas encore trouvé d’éditeur… parce que je n’ai pas eu le temps de m’en occuper. C’est un truc qui sort vraiment de ma route habituelle, une oeuvre de pure imagination, surréalisante. Ça s’appelle L’Appel des Éléphants, l’histoire d’un jour de grève dans un aéroport, lieu de passage où les gens ne s’arrêtent normalement pas.
Comme c’est projeté dans un futur où les avions vont nécessairement se développer, les pistes sont directement accessibles depuis le grand hall des voyageurs. Il y a 3 niveaux : le ciel symbolique, le niveaux des services et le sous-sol – les anciens parkings : des installations très technologiques avec des gens en ciré, qui agissent conformément à des processus, une sorte de no man’s land.
Mon personnage s’appelle Lui ; il descend, il remonte, se balade entre les 3 niveaux – qui me viennent d’Internet : les strates, la notion d’hypertexte… – et rencontre un tas de gens : il y croise deux portugais sur un engin qui tape contre les murs, pour aller plus loin et voir ce qu’il y a derrière. Il rencontre un dentiste, un agent immobilier qui fuit vers l’Amérique suite à des malversations… Il croise régulièrement un belge spécialiste des éléphants qui s’en va au Congo, qui lui parle à chaque fois des éléphants. Il en a plein la tête des éléphants ! Et un jour, alors qu’il lui en parle, il voit passer les éléphants qui se tiennent par la queue, et décide de les suivre.
Je voudrais faire de ce livre une oeuvre originale sur Internet. J’ai déjà collecté des tas de photos ; j’ai moi-même de nombreuses photos prises lors de mes passages dans les aéroports. C’est là que je réfléchis à trouver une autre forme d’écriture ; une écriture qui relève d’une nouvelle forme d’esthétique liée à l’écriture en mouvement et en mosaïque, que l’on retrouve aujourd’hui sur le web. Une écriture que j’ai déjà pressentie dans le manifeste de l’Esthétique de la communication dont l’Esthétique relationnelle de Nicolas Bourriaud n’est qu’un ersatz tiède publié quelques années plus tard, sans aucune mention d’ailleurs aux antécédents…
Voilà pour mes projets du moment. J’ai l’impression que les choses sont en train de changer pour moi ; il faut maintenant que je dure assez longtemps pour que ma famille en bénéficie après ma disparition, qui n’est nullement programmée à l’heure actuelle, fort heureusement ! »
Propos recueillis le 23 janvier 2014 par Guillaume Horen, chez Fred Forest.