L’art aux artistes : tous avec John Hamon !
Nous avons le plaisir de vous proposer une édition exceptionnelle d’un pionnier de l’art urbain, John Hamon, qui depuis le début du 21e siècle se propage dans la ville et sur le web.
Ce tirage, en édition limitée, fait partie de son oeuvre « Exposition promotionnelle Perrotin », actuellement en cours de prolifération dans les rues de Paris.
En vente en exclusivité sur Achetez de l’Art – tout comme les billets Hamoney, ou le print Hamonalisa de John Hamon – ne ratez pas ce print qui reprend le visuel de l’affiche collée dans tout Paris (sans le texte) !
Nous mettions déjà en avant il y a quelques années un des rares portraits de John Hamon en vente aux enchères.
Cet artiste, tout en ayant su rester dans l’anonymat, est connu dans tout Paris, en France et même à l’international grâce à ses campagnes promotionnelles minimalistes, basées exclusivement sur son portrait figé dans le temps, diffusé à grande échelle sur des affiches, projeté sur les bâtiments les plus célèbres et partagé sur Internet et les réseaux sociaux (retrouvez-le sur Facebook et Instagram et visitez son site). Mais pourquoi un tel acharnement à nous faire voir ce portrait ? Quel est le message ?
Nous avons rencontré John Hamon il y a quelques jours : il nous a présenté sa démarche, cohérente, son rapport aux institutions ; nous avons parlé de censure et de plagiat, et il nous a surtout expliqué là où il veut en venir.
Et c’est désormais nettement plus clair : John Hamon veut servir d’exemple et prouver aux autres artistes qu’ils n’ont pas besoin de se soumettre pour pouvoir exister. L’art aux artistes !
Vous souhaitez acheter cette sérigraphie de John Hamon ?
Rendez-vous dans notre boutique en ligne
nb. Les membres du Club Achetez de l’Art bénéficient d’avantages sur cette oeuvre. Rejoignez le club Achetez de l’Art 🙂
Détail de l’oeuvre
Exposition promotionnelle (2018) de John Hamon (né en 1982)
Technique : Impression offset quadrichrome
Papier : Papier couché 250g
Dimensions : 70 x 50 cm
Prix : 200 EUR TTC (+ frais d’envoi)
Numérotée sur 30 en bas à gauche
Signée en bas à droite John Hamon
Fournie non encadrée, avec un certificat d’authenticité blockchain (sur demande)
John Hamon, c’est ce visage anonyme que tout le monde connaît. La détermination de cet artiste, qui a depuis 2001 collé son portrait dans plus de 80 villes de 30 pays, son bon sens, son envie de donner l’exemple au travers d’une démarche cohérente, son nombre de followers sur les réseaux sociaux laissent pantois. L’édition que nous vous proposons en exclusivité sur Achetez de l’Art est exceptionnelle en raison notamment de la rareté des oeuvres en vente de ce pionnier de l’art urbain, entré depuis longtemps dans l’histoire de l’art, n’en déplaise à ses contempteurs.
L’interview de John Hamon
Nous avons pu échanger avec John Hamon le 28 septembre dernier. Retrouvez ci-dessous son interview.
« J'aimerais à terme que ma démarche fasse exemple, que les artistes comprennent qu'ils n'ont pas besoin de se soumettre pour pouvoir exister. » John HamonClick to TweetLe premier portrait affiché date de 2001 : dans quel contexte ?
C’était dans le 13e arrondissement ou peut-être au Musée d’art moderne. J’y allais beaucoup, plus jeune, pour me confronter à tous les artistes classiques. Ma démarche, depuis, s’intègre vraiment dans l’histoire de l’art : c’est une réponse, une position, une direction mais toujours dans le contexte de l’histoire. J’ai l’impression d’entretenir une conversation avec les artistes qui ne sont plus là, et ceux qui ne sont pas encore là et qui pourraient peut-être un jour être inspirés par ce que je fais. C’est une histoire de connexion entre les générations.
Combien de portraits as-tu collés depuis 2001 ?
Je n’ai pas de réponse à cette question, d’autant qu’avec Internet et les réseaux sociaux c’est devenu exponentiel !
Facebook m’a récemment invité à une conférence, ayant bien compris qu’il se passait quelque chose avec les artistes sur les réseaux sociaux. Quant aux institutions, qui en sont encore en au Moyen-Âge, elles ne se rendent pas compte que les grosses entreprises comme Facebook ambitionnent de les remplacer, ce qui est quand même assez grave. Je suis en contact en ce moment avec pratiquement toutes les institutions et j’avoue que c’est compliqué : elles se renvoient toutes la balle !
Je considère que c’est aux institutions publiques de repérer ce qui se passe, or j’ai par exemple compris lors de mon action au Palais de Tokyo que cet établissement était privé. Beaucoup pensent que c’est public mais en réalité son modèle repose essentiellement sur un financement privé. Cette entité, censée être représentative de l’art d’aujourd’hui, n’est donc pas publique. Les fondations n’en parlons pas ; il ne reste que le Centre Pompidou, avec qui je suis en contact.
Je leur ai expliqué que je comptais y réitérer mon projet d’exposition pirate du Palais de Tokyo, en essayant de les impliquer – tout en sachant que je n’ai pas besoin d’eux pour le faire – mais ils n’ont pas encore accepté.
On parlait d’une progression dans ton travail. Lorsqu’on avait échangé il y a trois ans, il n’y avait rien de mentionné sur tes affiches. Après il y a eu Nojnoma, puis John Hamon. Est-ce pour qu’on puisse mieux t’identifier ?
Oui, en partie. Au départ il devait y avoir mon nom sur la première affiche, et même y avoir écrit « artiste ». Finalement je suis parti simplement sur le portrait en noir et blanc ; un portrait initialement en couleurs que j’ai photocopié, ce qui s’est avéré être le plus simple.
Et ça a pris comme ça. On ne voyait pas grand-chose à l’époque dans la rue – quelques mecs faisaient un peu de graffiti ; il y avait Invader qui commençait aussi, et c’est tout. En réalité les anciens avaient quand même un peu calmé leurs ardeurs, sauf peut-être MisTic et Jérôme Mesnager ; ils n’étaient plus vraiment présents dans Paris. Et ils n’avaient de toute façon pas cette volonté comme Invader ou moi de se propager dans la ville : ils intervenaient à droite à gauche, mais pas de diffusion à grande échelle.
Quand j’ai lancé cette démarche je me suis inspiré des campagnes électorales, des politiciens et du graffiti. Un mélange de tout ça, en cohérence avec l’histoire de l’art, notamment par respect pour les artistes. Tu ne peux pas te prétendre artiste en ignorant ce qu’ont fait tous les plus grands génies de l’humanité !
Ce portrait que tu diffuses est lié à l’histoire de l’art ?
Complètement. Le portrait est un pilier de l’histoire de l’art, l’autoportrait n’en parlons pas. Le sourire rappelle évidemment celui de la Joconde, même s’il vient aussi de la publicité, avec le sourire de monsieur Propre. Laisser son empreinte sur les murs de la ville renvoie à ce qui se fait depuis la nuit des temps, lorsque les premiers hommes marquaient les parois des grottes. Ce sont nos racines ! Je me suis aussi évidemment confronté au minimalisme, le fait de réduire au minimum l’expression et le message ; à l’art conceptuel car il y a bien sûr un concept dans mon message ; au pop art avec Warhol mais sans le côté « célébrité » car cela ne m’intéresse pas. L’aspect promotionnel oui, mais je ne suis pas à la recherche de célébrité et c’est d’ailleurs pour ça que je n’apparais plus.
Concernant l’évolution du texte, John Hamon est mon vrai nom. Au début je n’étais pas trop sûr et l’ai donc mis à l’envers : Nojnoma. Mais lorsque j’ai reçu un coup de fil d’un commissariat, qui m’avait donc retrouvé, j’ai réalisé que ça ne servait à rien de se cacher et j’ai décidé d’utiliser mon vrai nom.
Certains street artistes ne comprennent pas pourquoi je me suis parfois mis à côté de leurs oeuvres. Mon visuel étant quand même assez radical : cela faisait passer un peu la pilule au début. Je me mettais à côté d’Invader notamment, pour que les passants comprennent, car visuellement il y a pas mal de personnes qui ont du mal à admettre que c’est de l’art, car c’est un visuel et il n’y a pas forcément d’émotion. Les gens ont une idée de l’art, qui doit correspondre à ce qu’est leur idée de l’art…
Avec le temps, ils ont tout de même bien vu que ta démarche était sérieuse, que tu te démènes à coller tes affiches la nuit… Tu travailles seul ?
Non, plus maintenant. Je me concentre désormais sur les projections et les affiches qui sont en hauteur, et lorsque je monte une campagne d’ampleur je m’entoure d’experts. Je connais d’ailleurs tous les afficheurs de Paris !
Tout cela à un coût ; comment fais-tu pour vivre ?
Ce n’est pas le plus important. Je me débrouille à ma façon et je ne me pose pas cette question. Je vais tout de même y répondre très simplement : j’ai remis mon destin entre les mains de Dieu, et tant qu’il me laisse faire et me donne les moyens de continuer, je n’ai pas peur. J’ai toujours avancé ainsi.
Tu suis ton chemin, avec cohérence et détermination, mais cela doit parfois être difficile face aux critiques ?
J’ai été critiqué dès le départ. Je maîtrisais un peu moins les tenants et les aboutissants ; aujourd’hui je les maîtrise beaucoup mieux. Et franchement il y a très peu de gens qui m’ont invité pour me remettre en question sur le fond, dans un débat public. C’est ce que j’ai vécu récemment avec la Fondation Lafayette Anticipations : quelqu’un m’a suggéré de venir m’expliquer. Je lui ai répondu que j’étais bien évidemment disposé à discuter de sa vision de l’art et de la mienne en public, car je suis en effet toujours prêt à débattre avec n’importe qui sur le sujet. Je sais où je vais ; j’assume ma démarche, ses limites et sa position.
Tu es de plus en plus connu, au-delà des murs des villes, grâce à Internet et aux réseaux sociaux, avec un nombre d’abonnés impressionnant !
Ça fait partie du truc. Si Facebook m’a invité pour cette conférence à Marseille, c’est aussi parce qu’ils ont repéré que j’étais un des pionniers à me servir de ces réseaux en tant qu’artiste, et à utiliser leur publicité dans ma démarche. Mon exemple les intéresse évidemment, pour que les autres artistes s’en servent aussi commercialement. Et je pense que cela pourra aider les artistes à devenir indépendants financièrement, ce dont nous allons parler.
La performance dont tu es le plus fier ? Est-ce qu’une action sort du lot ?
Il y en a beaucoup : la Tour Eiffel, l’Assemblée nationale, la tour de Pise, qui était pour le coup très compliquée…
De combien de temps disposes-tu en général, avant que la police n’intervienne ?
Ça dépend. Tu sais j’ai fait la Tour Eiffel au mois de janvier : il faisait moins 6 degrés et il n’y avait pas grand monde dans les rues ; je n’ai pas eu trop de problèmes. Lorsque les policiers passent, ils me demandent parfois de m’arrêter mais sont en même temps curieux, et me posent des questions. C’est rare qu’ils arrivent tout de suite en mode agressif, d’autant qu’ils voient bien qu’il n’y a pas de vandalisme.
Tu parlais d’Invader et des autres artistes : les as-tu rencontrés ? Et échangé avec eux des « bonnes pratiques » ?
Invader m’a contacté pour me demander de ne plus me mettre à côté de lui. Je lui ai dit que ça ne servait à rien d’aller à la confrontation. Pour moi ce serait promotionnel, mais j’aimerais autant qu’on fasse un truc ensemble, qu’on montre qu’il n’y a pas d’histoire parce que dans le fond je sais qu’il a toujours apprécié ce que je faisais.
Je fais de plus en plus de collaborations car cela a toujours fait partie de ma démarche, même si elle peut paraître radicale.
On a parlé de l’Assemblée nationale, de la Tour Eiffel, de l’Arc de Triomphe : ce sont des actions symboliques importantes. On se demande même parfois, en voyant les images, si elles ne sont pas truquées…
Rien n’est faux, même la Tour de Pise où pour le coup je me suis fait arrêter par l’armée. C’est un site très sensible ; c’était juste après les attentats qui avaient eu lieu en Espagne. L’armée était en poste devant et j’ai juste calculé le temps qu’il leur faudrait pour arriver. J’ai fini avec les carabiniers et c’est monté jusqu’au général… Une expérience amusante a posteriori mais tout de même un peu flippante sur le coup : tu es dans un pays étranger, avec une politique et une langue que tu ne connais pas.
En France il n’y a pas autant de pression quand tu réalises une action. Je veux tout de même ici aborder la question de la censure, qui est une réalité. Je suis allé faire une projection à la fondation Louis Vuitton, pendant la Nuit des Musées. Ils se prétendent le phare dans la nuit de l’art, ils veulent nous illuminer de leur connaissance mais dès qu’il se passe un truc différent, tu as droit à leur service de sécurité !
Ils se sont mis devant mon projecteur, me demandant de l’éteindre, ce que j’ai refusé en leur suggérant d’appeler la police. Ce qui est assez incroyable, c’est que la police n’a pas voulu m’arrêter. Le service de sécurité a insisté et la police a même fini par prendre ma défense ! Il s’agissait de policiers à vélo ; ils seraient passés à côté et n’auraient probablement rien dit. Pour eux il ne se passait rien de grave, mais ce service de sécurité, cette police de la culture t’empêche de créer, même lors de la Nuit des Musées.
Idem au Palais de Tokyo, qui m’a envoyé des vigiles se mettre devant mon projecteur, que j’ai dû placer sur le toit de ma voiture. Ils étaient donc obligés de faire intervenir la police, mais n’ont pas pu aller aussi loin car il y avait beaucoup de monde qui faisait la queue. Ils sont tout de même censés représenter les artistes, l’ouverture…
La fois suivante le directeur n’a pas appelé la police mais est venu en personne, avec son assistant : « ce n’est pas possible, vous ne pouvez pas faire ça ». Et là j’ai compris que j’avais gagné. C’est ce que je veux montrer : ils jouent la carte de la grande ouverture, mais ce n’est pas la réalité.
Dès que tu fais quelque chose qui ne vient pas de leur réseau cela ne passe pas et ils ont donc recours à la censure… voire au plagiat car à la suite de mes projections au Palais de Tokyo, ils ont commandé à un artiste des projections sur la façade du musée. Quelqu’un qui ne faisait pas de projection dans son travail : le directeur l’appelle pour qu’il en fasse ! En reprenant purement et simplement mon idée…
Bonne idée, John Hamon ! En même temps tu n’as pas le monopole des projections : regarde Art Paris qui fait ça depuis longtemps…
Pour replacer dans le contexte je faisais déjà des projections à l’ouverture du Palais de Tokyo, en 2002. Je suis revenu sur ce que je faisais déjà bien avant que tout le monde s’y mette. Il n’y avait alors pas de projecteur adapté ; je travaillais avec des projecteurs diapo. J’ai finalement attendu que le matériel évolue pour pouvoir projeter correctement sur la Tour Eiffel par exemple. Au Palais de Tokyo cela n’avait jamais été fait auparavant, et à l’exposition suivant mon intervention, ils se sont mis aux projections…
Je veux que les artistes reprennent le pouvoir de l’art. L’art aux artistes est d’ailleurs le titre de ma prochaine campagne. On se rend compte aujourd’hui que ceux qui font l’art sont tout sauf les artistes. C’est le directeur et les curateurs qui vont définir ce qui doit être fait ; ce n’est plus l’artiste qui est aux manettes, à la source de la création.
Tu parles de plagiat, et avec Internet et les réseaux sociaux ?
Mon travail a évidemment été récupéré par beaucoup de monde. Si je les citais tous… Aujourd’hui toutes les marques, notamment les marques de luxe, font des campagnes d’affichage « sauvage », communiquent avec les projections. Céline en ce moment fait une campagne dans les rues de Paris avec un projecteur. Ils se servent comme moi d’un camion avec un projecteur. Ce sont des procédés que j’ai initiés ; beaucoup en font aujourd’hui leur business. Sans parler des artistes, mais ça fait partie du jeu.
Avec ton expérience tu pourrais donner des leçons aux communicants car tu maîtrises tous les arcanes de la communication !
En effet, et j’ai d’ailleurs reçu le prix des Chatons d’or 2018 émanant de tous les publicitaires de France ! Eux ils savent, cela les fait plus marrer qu’autre chose.
Et la campagne Perrotin ?
Pour Perrotin l’opération va s’appeler Exposition promotionnelle. La campagne, dont font partie les affiches, les posts sur les réseaux, les mailings, est une vraie campagne, en bonne et due forme. J’essaie de plus en plus d’y associer les médias, même si cette fois je n’ai pas vraiment eu le temps ; je le ferai probablement avec celle du Centre Pompidou, avec des partenaires médias sur l’affiche.
La campagne c’est l’oeuvre ; ça comprend l’affichage, la création de l’affiche, importante. Je m’inspire à chaque fois de leurs codes de communication, de leur logo, de leur typo ; je vais jusqu’au bout. Perrotin ne communique pas trop avec des affiches, c’est donc un peu plus libre. Vu qu’il ne fait jamais de campagne, cela m’amusait de lui en faire une ; une vraie campagne, qui devrait être assez massive.
Quelle volumétrie ?
Plus de 2 000 affiches et un paquet de trucs autour, dont un beau budget pour les réseaux sociaux. Normalement cela devrait envoyer ; je ne veux pas vendre la peau de l’ours mais je donnerai en tous cas le maximum.
Les as-tu contactés ?
Cette fois-ci non ; je l’ai juste évoqué dans une interview. Il existe une vraie différence : une galerie n’a pas d’obligation envers les artistes, contrairement à un Palais de Tokyo par exemple, avec qui j’aurais dû pouvoir tisser des liens. Perrotin représente ses artistes ; il fait son boulot de la façon qui est la sienne.
Tu fais en quelque sorte un cadeau à Perrotin en lui faisant une énorme publicité, dont il n’a probablement pas besoin ?
C’est très bien s’il le prend comme ça. Si je l’ai choisi c’est avant tout symbolique, parce qu’il est le galeriste le plus important en France. Il y a évidemment un aspect critique dans ma campagne, mais je reste dans l’échange et ne suis pas là pour donner des leçons sur ses artistes et sa façon de gérer son business.
Quand on voit cependant ses dernières sélections – des stylistes, chanteurs, photographes, des créateurs – cela montre que les artistes du sérail, qui sortent de l’institution, ne sont plus vraiment à la hauteur pour pouvoir intégrer ce genre de galerie.
Cela montre aussi ce que les galeries sont prêtes à faire pour pouvoir vendre. Une galerie a besoin de faire du chiffre d’affaires et s’oriente de plus en plus sur le mainstream au détriment de l’avant-garde.
Des monuments comme Perrotin ou la Fiac ont évidemment une logique commerciale ; ils sont de tout premier plan, et leur objet reste le business. Je n’ai rien contre mais cela pervertit quand même un peu les choses. Les artistes qui sortent de Perrotin finissent par faire des sacs pour Vuitton.
Je n’ai évidemment rien contre l’objet promotionnel, au contraire…
On ne risque pas de te le reprocher, puisque tu mets en vente une édition des affiches de la campagne sur Achetez de l’Art ?
Je peux faire des collaborations. L’objet publicitaire je l’assume complètement, c’est dans ma démarche. Au contraire, je regrette même de ne pas en faire plus. Cette édition en vente sur Achetez de l’Art fait partie de la campagne et est parfaitement cohérente avec ma démarche.
Est-ce une façon supplémentaire de faire ta promotion ?
Évidemment. Il y aura deux choses : l’affiche en elle-même, et le visuel qui a un intérêt esthétique en soi et mérite donc une édition particulière. J’essaie de faire en sorte que tout soit cohérent et c’est vrai que je n’ai pas le temps de penser à ma carrière, à la commercialisation ; je ne suis pas très présent sur le marché de l’art car je passe beaucoup de temps sur les actions, sur des choses plus pragmatiques. Gérer un business prend du temps ; si j’essaie depuis 17 ans d’être encore pertinent en tant qu’artiste, il s’agit d’un véritable exercice : il faut les lancer les campagnes, il faut les porter ! Les internautes voient le post à la fin, mais ne réalisent pas tout ce qu’il y a derrière. Lorsque je partage la campagne de la Tour de Pise, on n’imagine pas la logistique en amont… ni les arrestations.
Tes prochains projets ?
Le centre Pompidou, et la campagne « L’art aux artistes » dont je parlais à l’instant, pour 2019. Je souhaite vraiment montrer à quel point les artistes ont été mis en dehors du système de l’art et de son organisation. Les artistes d’aujourd’hui sont là de plus en plus pour illustrer un propos, plutôt que de proposer. Les institutions y sont pour beaucoup car c’est elles qui ont les manettes et imposent leur idéologie à grand renfort de communication.
Les artistes ont été mis en dehors du système de l’art, malgré le digital ?
Les artistes ont bien compris l’utilité des réseaux. Mais l’ambition des Facebook et des autres, c’est que la reconnaissance sur les réseaux fasse foi par rapport à la reconnaissance des institutions.
Je leur lance une véritable alerte, pour leur montrer à quel point il y a un passage de relais, de responsabilité : je suis prêt, les autres artistes vont en faire autant. À travers les réseaux le développement de l’économie va pouvoir se faire et si l’artiste développe sa propre économie, le marché de l’art contemporain risque de s’effondrer, changer de paradigme.
J’espère juste que les collections de MM. Pinault et Arnault sont bien verrouillées intellectuellement car le jour où les artistes n’auront plus besoin de passer par cette économie-là, tout cela va s’effondrer. Le tri aura lieu : que restera-t-il ? C’est pour cela qu’ils engagent d’énormes moyens pour valoriser leurs fonds, car ils savent qu’ils ne valent finalement pas grand-chose.
J’aimerais à terme – car je sais qu’au final je vais gagner – que cela fasse exemple, que les artistes comprennent qu’ils n’ont pas besoin de se soumettre pour pouvoir exister en tant qu’artistes. Beaucoup le font en pensant y être obligés. Ma démarche aboutira, fera foi et le message passera.
Belle conclusion, merci John.
Propos recueillis par Guillaume Horen le 28 septembre 2018 à Paris