[Conseils]
Par Hadrien Brissaud, Appia Art
Quel contrat d’assurance pour les galeries et marchands d’art ?
Les galeries et les professionnels du marché de l‘art, antiquaires et marchands en chambre, souvent appelés Art Dealers, ont une problématique d’assurance similaire et bien précise.
Les objets d’art que tous ces acteurs doivent assurer, sont pour partie leur stock propre, acheté par la galerie, et pour partie des dépôts de tiers, mis en vente par la galerie. Le stock total des objets d’art à assurer varie donc constamment et nécessite une police d’assurance offrant une grande flexibilité. À cela, s’ajoute la participation de la galerie à des foires, les transports qu’elle va réaliser pour aller chercher ou livrer les œuvres, et les dépôts qu’elle va faire chez des tiers, restaurateurs, encadreurs ou experts.
Les polices d’assurance dommage aux objets d’art des professionnels accordent dans leur grande majorité une garantie en « Tous risques sauf ».
La garantie « Tous risques sauf » couvre tous les sinistres causés aux œuvres d’art, à l’exception de ceux faisant l’objet une liste exhaustive précise d’exclusions reprises dans les conditions générales du contrat.
Ce type de garantie a l’avantage d’offrir à l’assuré la couverture la plus large possible pour ses objets d’art. En cas de sinistre, l’assuré n’a pas à prouver que la cause du sinistre est couverte au titre du contrat. C’est à l’assureur de prouver que la cause du sinistre fait partie (ou non) de la liste des exclusions reprises aux conditions générales. C’est ce qu’on appelle communément le renversement de la charge de la preuve.
La garantie « Tous risques sauf » s’oppose donc aux garanties traditionnelles dites en « périls nommés » que l’on retrouve majoritairement dans les contrats multirisques habitation ou professionnel.
Ces polices objets d’art sont construites en trois parties :
1. La couverture du stock et séjour
Dans cette section, sont précisées les adresses des risques à garantir pour la galerie (galerie, bureau, stockage, adresse personnelle du galeriste), est mentionné le montant total des capitaux assurés en valeur déclarée ainsi que les sous-limites éventuelles propres à certaines adresses de risque. En fonction de la spécialité du galeriste, d’autres sous-limites peuvent être appliquées. Voici les deux principales à prendre en compte :
• La sous-limite en objets fragiles :
Sont considérés « fragiles » les objets par nature cassant tels que les terres cuites, plâtres, marbres, grès, verreries, porcelaines, faïences, cires et autres matières composites cassantes.
• La sous-limite en bijoux et objets précieux :
Sont considérés « précieux » les objets de valeur tels que les bijoux (en ce compris les montres), pierres précieuses et semi-précieuses non montées, les objets en platine, or, vermeil ou argent massif et l’orfèvrerie.
L’ensemble de cette garantie en séjour aux adresses de risque s’applique en « Tous risques sauf ».
2. La couverture transport en « clou à clou »
La garantie s’exerce ici en « Tous risques clou à clou », le « clou à clou », signifie que la couverture d’assurance prend effet du moment où l‘œuvre est décrochée ou enlevée d’un point A, jusqu’à son retour sur son lieu de départ sans aucune rupture de garantie.
L‘avantage de cette garantie est d’assurer la pleine continuité de la couverture pendant toute la période du transport, de la manipulation, de l‘exposition et du retour de l’œuvre. C’est d’autant plus important lorsque l’on sait que la plupart des sinistres sur les objets d’art se concentrent lors des transports et de la manipulation de ces œuvres.
Pour définir la couverture transport dans les contrats des professionnels, plusieurs éléments sont à mentionner : la territorialité des transports, le mode de transport et la limite des capitaux transportables par l’assuré.
Les assureurs ont défini trois niveaux de territorialité : France / Europe / Monde entier (sauf pays en guerre).
Chaque niveau de territorialité est complété par un mode de transport et une limite de garantie. L’ensemble de cette garantie est souvent repris dans un petit tableau mentionnant les couvertures transport par niveau de territorialité et les taux de régularisation en cas de dépassement de la limite couverte au contrat.
Territorialité | Limite de transport | Taux de rég. en cas de dépassement |
France | 500 000 € | 0.00X % |
Europe | 300 000 € | 0.00X % |
Monde entier | 150 000 € | 0.00X % |
Ce tableau est donné pour un mode de transport prédéfini, on en compte trois de manière générale :
- Transport réalisé par l’assuré ou un préposé de la galerie
- Transport par messagerie type Fedex ou UPS (souvent avec des limites très basses et excluant les objets fragiles ou précieux)
- Transport réalisé par un professionnel spécialisé
Dans ce type de contrat, la couverture annuelle de transport s’entend toujours par transport. Dans notre tableau ci-dessus, un galeriste peut réaliser en France autant de transports qu’il le souhaite pour un montant de 500 000 € sans en informer les assureurs ni payer de surprime. La prime pour cette couverture est payée en début d’année au titre du contrat annuel.
Exemple : Sur base du tableau de garantie précédant, un galeriste a mentionné dans ses conditions particulières qu’il peut réaliser, par ses propres moyens, les transports des objets d’art de sa galerie dans la limite de 150 000 € de capitaux transportés, en France uniquement. Il a donc le droit de transporter, avec son véhicule personnel, un tableau de 150 000 € afin de se rendre de Paris à Marseille. En revanche, il devra prendre un transporteur spécialisé pour un trajet de Paris à Bruxelles.
IMPORTANT : La limite de transport ne stipule pas toujours les conditions de transport. Il est toujours très important, quelle que soit la limite mentionnée au contrat, de respecter les modalités de transport et d’emballage imposées par les assureurs aux conditions particulières du contrat.
3. Couverture des foires et salons
La garantie « foires et salons » n’est pas toujours incluse dans les contrats des professionnels du marché de l’art. Elle permet de couvrir la participation de ces derniers à des évènements tels que les foires et les salons artistiques, et ce partout dans le monde. Cette garantie peut bien évidemment être aussi acquise temporairement par avenant au contrat pour chaque foire.
La couverture d’un professionnel, pour sa participation à un salon ou une foire, lui offre généralement une garantie en clou à clou des objets exposés, depuis le lieu de stockage du client, jusqu’à leur retour après le salon. Sur toute la période du départ au retour des œuvres, en passant par le transport, l’exposition et l’installation, les œuvres sont assurées en tous risques sans aucune rupture de garantie.
Si les assureurs proposent plusieurs façons d’inclure la garantie « foires et salons » dans les contrats des galeries et des marchands, celle-ci demeure in fine identique.
Penchons-nous d’abord sur la manière «souple » d’appliquer la garantie « foires et salons » qui mentionne la couverture d’un certain nombre de foires par zone territoriale, un peu à la façon des transports. Un client sera ainsi couvert par exemple au titre de son contrat annuel pour :
- 1 foire en France dans la limite de 500 000 €
- 1 foire en Europe dans la limite de 300 000 €
- 1 foire dans le monde entier dans la limite de 200 000 €
Même si le client ne possède pas de couverture transport à l’année, ces trois foires seront bien couvertes en clou à cou, c’est-à-dire que le transport sera inclus sans surprime.
L’assuré devra cependant faire parvenir aux assureurs, dans les 72h ou 48h avant le début du transport, les informations suivantes :
- Le nom de la foire à laquelle participe l’assuré
- La liste complète et valorisée des objets transportés et présentés lors de la foire
- Les dates de début et de fin des transports et d’exposition en foire
- Le nom du transporteur qui réalisera le transport allé et retour
En cas de dépassement du capital déclaré au contrat pour la foire en question, les assureurs appliqueront un taux de régularisation et appelleront une surprime pour la couverture de cette foire.
Deuxième manière de déclarer la garantie, il s’agit d’indiquer plus précisément les foires couvertes au titre du contrat annuel, en mentionnant les noms exacts et les dates de ces foires. Dans ce cas, l’assuré aura uniquement à transmettre aux assureurs la liste valorisée des œuvres et le nom du transporteur dans les 72h ou 48h avant le début du transport.
Enfin, la dernière option envisageable est de déclarer, au cas par cas, les foires auxquelles le professionnel participera. La couverture de la foire sera alors actée ponctuellement par avenant par les assureurs, qui percevront ainsi une surprime pour chaque participation à une foire ou un salon. Cette dernière option est la plus souvent utilisée car de nombreux professionnels n’ont pas toujours la visibilité nécessaire pour savoir à combien de foires ou salons ils pourraient participer dans l’année. Cependant, cette solution a le défaut d’être sensiblement plus chère que le fait d’inscrire les foires et les salons directement au contrat.
Garantie des objets confiés à des tiers
La garantie « chez les tiers » est acquise au titre du contrat et permet au client de déposer des objets chez des tiers professionnels, restaurateurs, experts, encadreurs ou autres, le temps qu’ils réalisent leurs opérations de restauration, d’expertise ou d’encadrement.
Cette couverture permet de garantir en clou à clou les objets depuis les adresses de risque de l’assuré jusqu’à leur retour.
Exemple : Un antiquaire vient de faire l’acquisition d’une toile XVIIIe lors d’un vente aux enchères, mais celle-ci est n’est pas bien encadrée et surtout très encrassée. Il va l’envoyer donc chez le restaurateur pour la faire nettoyer puis chez l’encadreur pour lui faire poser un cadre d’époque mettant en valeur la peinture, avant de la présenter en galerie ou en foire à ses clients. Lors de ces deux séjours chez des tiers professionnels, l’antiquaire sera assuré par la garantie « dépôts chez les tiers » en cas de sinistre sur son œuvre. Il appartiendra aux assureurs d’engager un recours contre le tiers en tort par la suite, mais l’antiquaire sera certain de se voir indemniser sans attendre que le recours n’aboutisse, ce qui peut prendre souvent plus d’un an.
IMPORTANT : la durée de couverture chez les tiers varie fortement d’un contrat à l‘autre, allant de 30 à 90 jours.
4. Autres garanties des contrats professionnels
Dans certains contrats d’assurance, des garanties complémentaires peuvent être proposées par les assureurs pour améliorer la couverture.
Voici une liste non exhaustive des garanties complémentaires susceptibles de retenir l’attention d’un assuré :
• La garantie « annulation de foires » : elle couvre jusqu’à 40 000 € (chez certains assureurs) de frais irrécupérables si l’assuré est dans l’impossibilité de se rendre à la foire, suite à un accident corporel, une maladie, un sinistre grave à la galerie, la destruction du véhicule transportant les biens, une grève ou autres événements imprévisibles définis aux conditions générales.
• La garantie « vol en devantures » : suite au bris de glace ou écartement des glace jointives et sans pénétration dans les locaux de l’assuré en période d’absence de l’assuré à la galerie.
• L’indemnisation du droit de suite des artistes, suite à un sinistre total. En référence à la directive européenne 2004/84/CE, les artistes ou leurs ayants droit durant 70 ans après leur décès peuvent être indemnisés du droit de suite appliqué sur l’œuvre, dans la limite de 12 500 € par œuvre. Le droit de suite est prévu par l’article L 122-8 du code de la propriété intellectuelle.
Le contrat Hiscox, dédié aux professionnels de l’art, va même au-delà de la directive européenne. Il propose en effet pour tous les sinistres impliquant l’indemnisation du droit de suite une indemnisation sur la base d’un taux forfaitaire de 4% plafonné à 12 500 € alors même que la directive fixe le montant du droit de suite dans une fourchette de 0.25% à 4% du montant seulement.
Hadrien Brissaud
Courtier en assurance pour le monde de l’art – Appia Art
Illustration : ©Adobe Stock
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Une question sur l’assurance des oeuvres d’art ? N’hésitez pas à la poser à Hadrien Brissaud ci-dessous.
Assurance des œuvres en stock
Bonjour,
Je souhaiterais contracter une assurance seulement pour mes œuvres achevées ou en cours d’achèvement ainsi que mes stocks de châssis nus et châssis entoilés qui se trouvent dans mon atelier.
Un assureur contacté me dit que pour les œuvres achevées, il faudrait qu’elles soient enregistrées par un galeriste, même si elles sont à l’atelier !
Ayant plus d’une centaine d’œuvres en stock, comment procéder ? Et combien cela me coûterait ou m’engagerait vis à vis du galeriste ?
Bien cordialement
Assurance atelier d'artiste
Cher Monsieur,
Nous sommes en mesure de vous proposer une assurance pour votre atelier sans passer par une galerie d’art.
Je vous propose de me contacter par mail : hadrien@appia-art.fr pour essayer de répondre à votre besoin précis.
Bien à vous,
Hadrien Brissaud
ESPACE artistique
Bonjour,
Je possède un bâtiment, désigné comme tiers-lieu artistique où un restaurant, une guinguette, une bibliothèque partagée ainsi qu’un « espace libre » seront installés. Notre but est de sensibiliser les jeunes à l’art et à la culture, pour cela nous avons contacté des artistes sans grande visibilité pour qu’ils viennent disposer de « l’espace libre ». En gros, ils ne vont pas forcément exposer un tableau ou une sculpture, mais ils pourront avoir à disposition une surface de l’espace et l’occuper comme bon leur semble.
Il nous faut contracter une assurance mais j’aimerais savoir quel type vous nous conseillerez.
Merci d’avance.
Bonjour,
Merci pour votre question.
Il y a plusieurs éléments précis à savoir avant de pouvoir vous donner une réponse car dans votre cas il faut vraiment comprendre quelle est la nature de l’accueil du public, du lieu et des œuvres exposées pour vous répondre précisément.
N’hésitez pas à nous contacter directement sur hadrien@appia-art.fr
Bien à vous,
Hadrien
Assurance exposition
Bonjour,
Je dois exposer dans une galerie (en fait une grange aménagée) mes photos.
Le propriétaire des locaux (la commune) demande à ce que je sois assuré pour le bâtiment durant cette exposition qui dure 3 weekends. Quelle assurance dois-je prendre (MRH) et où car je ne trouve pas – ou à des prix exorbitants ? Merci pour l’aide que vous pourriez m’apporter.
Assurance Expo
Cher Monsieur,
Il s’agit ici de couvrir votre responsabilité civile exploitation pendant la durée de l’exposition au cas où vous pourriez (ou un visiteur) endommager le bâtiment.
Pour cela vous pouvez soit demander une extension de votre MRH, soit souscrire un contrat temporaire mais qui je pense sera un peu plus onéreux.
La mairie peut également étendre son assurance annuelle à l’exposition en question, ce qui serait je pense le plus simple.
Restant à votre disposition,
Hadrien