[Fiscal]

Par Me Ophélie Dantil, avocat

Vous êtes collectionneur, galeriste, artiste, chef d’entreprise et avez des questions liées à la fiscalité : pour votre déclaration d’impôt sur le revenu, sur la TVA, sur l’achat ou la location d’oeuvres d’art ? Visionnez le 1er webinaire Achetez de l’Art dédié à la fiscalité organisé avec Me Ophélie Dantil (mai 2018).

 

FiscalitéAmateur d’art ou collectionneur non professionnel, l’achat et la vente d’oeuvres d’art sont des opérations soumises à fiscalité : TVA, droits de douane, imposition des plus-values…
Vous avez des doutes ? Voici un rappel de la fiscalité française sur le sujet.

Retrouvez également nos articles sur la conservation et l’assurance de vos oeuvres, consultez notre guide pour savoir où acheter de l’art, et rejoignez le club de collectionneurs Achetez de l’Art pour des conseils avisés et autres avantages.

→ Lors de l’achat

TVA

En principe l’achat d’oeuvres d’art est assujetti à la TVA, mais à des taux différents selon les situations.

Le taux normal de TVA de 20 % s’applique pour toutes les acquisitions effectuées auprès d’une galerie, d’un antiquaire ou d’une maison de ventes situés en France.

Dans le cas d’une acquisition par un collectionneur français auprès des mêmes professionnels situés dans un pays de l’Union européenne, la TVA s’acquitte dans le pays du vendeur assujetti, selon ses règles nationales et au taux de TVA applicable dans l’État du vendeur.

Il existe toutefois certaines dérogations dans le cadre de la vente à distance : livraison d’un bien par un vendeur d’un État membre à destination d’un acquéreur particulier non assujetti à la TVA en France ou dans un autre état membre (l’État d’application de la TVA est soit celui du vendeur soit celui de l’acheteur, en fonction du chiffre d’affaires réalisé par ce vendeur dans cet État).

Le taux réduit de TVA de 5,5 % s’applique pour les importations d’oeuvres d’art, d’objets de collection et d’antiquité. Il s’agit donc de l’achat d’oeuvres à un vendeur situé dans un État hors de l’Union européenne.

Le taux de 5,5% s’applique, depuis le 1er janvier 2015 (voir notre article sur la TVA pour les oeuvres d’art), aux acquisitions effectuées directement auprès de l’artiste français ou de ses ayants droit.

L’acquéreur particulier n’étant pas assujetti à la TVA, il ne pourra pas la déduire : il s’agit donc pour lui d’un coût supplémentaire qui se rajoute au prix de l’oeuvre.

Aucune TVA n’est due par l’acquéreur si le vendeur n’est pas assujetti à la TVA, s’il bénéficie de la franchise prévue par l’article 293 B du CGI ou s’il applique le système de la TVA sur la marge.

Droits de douanes

Pour les oeuvres et objets d’art, de collection et d’antiquité, les importations sont, ont l’a vu, taxées à un taux réduit de TVA (5,5 %) et sont exemptées de droits de douane.

L’importateur paye donc au moment de la « déclaration de mise à la consommation » la TVA à 5,5 % calculée sur la valeur CIF (Cost – valeur de l’oeuvre, Insurance – frais d’assurance, Fret – frais de transport)

Pour les autres objets, les objets neufs et les biens d’occasion (c’est-à-dire les objets qui ont moins de 100 ans d’âge et qui n’ont pas le caractère d’oeuvre d’art originale ou d’objet de « collection ») sont soumis à des droits de douane et au taux normal de TVA (20 %) sur la valeur CIF.

→ Lors de la vente

Le particulier qui cède un objet d’art, d’antiquité ou de collection est soumis à une imposition spécifique. Sont également concernés les objets exportés définitivement dans un pays tiers à l’Union européenne.

En pratique, c’est la taxation forfaitaire qui s’applique à moins que le vendeur n’opte expressément pour le régime des plus values lorsque cette option est autorisée.

Application de la taxe forfaitaire
(article 150 VI du Code Général des Impôts)

Les cessions à titre onéreux et les exportations de métaux précieux, de bijoux, d’objets d’art, de collection ou d’antiquité sont soumises à une taxe forfaitaire proportionnelle au prix de cession (ou à la valeur en douane), tenant lieu d’imposition des plus-values.

Sont exclues du champ d’application de la taxe les cessions ou les exportations de bijoux, d’objets d’art, de collection ou d’antiquité dont le prix de cession (ou la valeur en douane) pour chaque cession ou exportation n’excède pas 5 000 €. En pratique, il convient d’apprécier ce seuil objet par objet, sauf lorsque les objets cédés ou exportés forment un ensemble.

Sont exonérées de la taxe les personnes qui n’ont pas leur domicile fiscal en France lorsqu’elles cèdent ou exportent des objets ou métaux précieux. L’exportateur doit toutefois pouvoir justifier d’une importation antérieure, d’une introduction antérieure ou d’une acquisition en France.

Sont également exonérées :

  • Les cessions aux musées, aux bibliothèques publiques et aux services d’archives publics ;
  • Les exportations sous condition de retour en France (exportations temporaires) ;
  • La vente ou l’exportation par les artistes de leurs propres oeuvres lorsqu’ils en ont la propriété continue depuis la création.

Sont donc imposables les cessions à titre onéreux, qu’elles interviennent en France ou dans un autre État membre de l’Union européenne , les exportations définitives, hors du territoire des États membres de l’Union européenne.

La taxe est alors calculée sur le prix de cession de l’objet ou sa valeur en douane.

Elle est due au taux de 6 % pour les bijoux, objets d’art, de collection ou d’antiquité. Si le vendeur ou l’exportateur est domicilié fiscalement en France, la CRDS au taux de 0,5 % est également applicable. Le taux global est donc de 6,5 %.

La déclaration de la taxe est accompagnée de son paiement. Elle s’effectue au moyen de l’imprimé fiscal n° 2091. La taxe est supportée par le vendeur.

Les infractions en matière de taxe sur les métaux et objets précieux sont sanctionnées par une amende fiscale égale à 25 % du montant des droits éludés.

Option pour le régime des plus values
(article 150 U A du CGI)

Le vendeur ou l’exportateur peut toutefois opter pour le régime d’imposition de droit commun des plus-values sur biens meubles à condition de justifier de la date et du prix d’acquisition du bien ou de justifier que le bien est détenu depuis plus de vingt-deux ans. Dans ce cas, la taxe forfaitaire n’est pas due.

L’option pour le régime de droit commun est irrévocable et est exercée sur l’imprimé n° 2092 (qui sert également à déclarer la plus-value réalisée).

Le vendeur a intérêt à choisir cette option en cas de vente aux enchères d’objets reçus par succession depuis deux ans au plus ; la plus-value étant nulle dans la mesure où c’est le prix d’adjudication qui est retenu comme valeur d’acquisition pour les droits de succession.

Les plus-values réalisées par les particuliers à l’occasion de la cession de biens meubles, dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé sont en principe taxables à l’impôt sur le revenu au taux de 19 % auxquels s’ajoutent les prélèvements sociaux de 17,2 % à ce jour soit 36,2%.

Les moins values réalisées le cas échéant ne sont bien sûr pas imposables mais ne peuvent s’imputer sur le montant des plus values réalisées par ailleurs la même année et les années suivantes.

La plus value correspond à la différence entre le prix de vente et le prix d’acquisition. Les frais d’acquisition et les frais de restauration et de remise en état qui viennent en augmentation du prix d’acquisition doivent toujours être pris en compte pour leur montant réel.

Le montant de la plus-value est ensuite réduit d’un abattement dont le taux est fixé à 5 % par année de détention au-delà de la deuxième année, d’où une exonération totale de la plus-value après vingt-deux ans de détention. L’abattement s’applique de la même façon pour l’impôt sur le revenu et les cotisations sociales de 17,2%.

Si, après abattement, il reste de la plus value, elle est donc imposable à 34,5 %

Pour l’application de l’abattement, le propriétaire revendeur doit pouvoir apporter un justificatif de la durée de détention du bien, sinon il sera imposé à la taxe forfaitaire de 6,5%.

Le droit de suite

Le vendeur particulier devra également, dans certains cas (lire nos conseils sur le droit de suite), prendre en charge un droit de suite s’il fait appel à un professionnel du marché de l’art pour procéder à la cession de ses oeuvres.

Ophélie Dantil, avocat fiscaliste du marché de l'art
Me Ophélie DANTIL Maître Ophélie Dantil sur Linkedin
Avocat associé, droit fiscal et droit du marché de l’art

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257 réponses sur “La fiscalité de l’amateur d’art”

  1. Artiste peintre à mon compte
    Bonjour Maitre,
    Depuis quelques mois je peins des tableaux, et des personnes veulent en acheter. N’ayant pas commencé à peindre pour cela, je suis un petit peu perdue face à la situation : puis-je les vendre de main à main ou dois-je créer une structure fiscale, ou peut-être à partir d’un certain seuil ? Les tableaux n’excèdent pas 600€ (la majeure partie sont entre 100 et 200€).
    Merci beaucoup à vous,
    Anne-Sophie

    1. Bonjour,
      Il n’existe pas de seuil minimum en la matière : la première vente devrait être taxable et pour cela il faut s’immatriculer auprès de l’URSSAF qui sert de centre des formalités. Mais à vous de voir si l’activité va continuer à générer des flux financiers ou non. Peut-être s’agit-il de ventes exceptionnelles qui ne seront pas pérennisées ou au contraire allez-vous développer une réelle activité qui nécessitera de passer au stade supérieur en terme de formalisme.

  2. Bonsoir
    Moi et ma soeur possédont un meuble de grande valeur, en indivision, et dont nous avons hérité en 2010. Il a été estimé 1500 € sur la déclaration de succession et nous avons payé des droits en conséquence (mobilier meublant, il ornait l’appartement de nos parents).
    Aujourd’hui un collectionneur nous propose de l’acheter pour 24.000 €.
    Je pense bien que cette vente est taxable, même si les droits de successions ont été acquittés.
    (on me parle aussi de vente de gré à gré mais j’ai un doute…)
    Avons-nous le droit d’opter pour la taxation forfaitaire de 6,5%, bien que la valeur d’inventaire ait été donnée en 2010 ? Cette valeur d’inventaire est très basse et l’option au régime de la plus-value s’avère plutôt onéreuse dans notre cas.
    De surcroît, et quelque soit l’option choisie, risquons-nous un redressement fiscal ?
    Et comme cette somme sera divisée entre nous deux, i.e. fera l’objet d’un paiement séparé, est-ce qu’elle sera effectivement comptée de manière séparée pour chacune de nous au regard du fisc, à savoir : est-ce que nous devrons faire chacune une déclaration pour le règlement de cette taxe ?
    Merci d’avance pour votre réponse.

      1. Bonsoir,
        La taxation forfaitaire est en effet plus avantageuse. En cas de cession sans la participation d’un intermédiaire à la transaction, le vendeur supporte la taxe et en assure le versement. Dans votre cas le plus simple est que l’une de vous deux dépose la déclaration n°290 – cerfa n°11294) et procède au paiement, à charge pour la seconde de rembourser la déclarante de sa quote-part.
        L’administration fiscale a jusqu’au 31 décembre de la 6e année suivant le décès pour rectifier une omission, une insuffisance ou une erreur commise dans votre déclaration. En l’espèce, si le décès a eu lieu en 2010, l’administration ne peut plus revenir sur la déclaration de succession.

  3. Don d'usage
    Bonjour Maitre,
    Je suis assistant depuis 17 ans d’un grand photographe à Monaco maintenant décédé.
    Je continue à travailler avec sa veuve.
    Elle m’a fait cadeau à l’occasion de mon mariage l’année dernière d’un portfolio signé et numéroté. J’ai mis celui-ci en vente chez Christie’s à Londres. Ils ont déduit la taxe forfaitaire de 6,5%.
    Une fois cet argent (200 000 euros) sur mon compte est ce que je devrai encore quelque chose aux impôts ? Ou bien la taxe forfaitaire est suffisante ? Je suis résident français.
    Cordialement

    1. Bonjour,
      Félicitations pour votre récent mariage !
      Vous ne devez plus rien bien heureusement. Bien entendu vous serez imposé sur les revenus que produiront ce capital.
      Bien sincèrement,

  4. Cher Maître,
    Ayant été une des muses d’un grand photographe décédé (très coté chez Sothebys NY, Londres), je souhaiterais vendre à un particulier, en direct un tirage (non signé) accompagné d’une lettre d’amour, manuscrite du photographe, signée datant de 1984… Pour le fisc, je m’y prends comment ? Quel formulaire impôt choisir ? Suis perdue…
    Bien cordialement.

    1. Bonjour,
      Sous réserve que vous soyez résidente en France et que l’œuvre vendue soit en France ou dans un état membre de l’Union européenne, en principe la taxation forfaitaire de 6,5 % sur le prix de l’œuvre devrait être appliquée mais comme vous pouvez opter pour le régime de la plus-value sur les biens meubles si vous êtes en mesure de prouver que vous détenez la photographie depuis 1984, alors vous « optez » pour ce régime et êtes exonérée d’imposition puisque a priori vous détenez (et pouvez justifier que vous détenez) le bien depuis plus de 22 ans.

  5. Bonjour Maître,
    Permettez moi de vous adresser ce mail car j’ai lu attentivement votre article sur la fiscalité des œuvres d’art, et j’ai une question à vous poser à ce propos.
    Je possède chez moi des œuvres diverses (tableaux, meubles…) que je souhaiterais vendre. En échange, j’aimerais en acquérir d’autres. Quelle est la limite en volume ou en valeur du total des transactions à ne pas dépasser, avant que le fisc ne considère cela comme une activité professionnelle ? Merci beaucoup d’avance.
    Bien cordialement,
    V.S.

    1. Bonjour,
      En fait il n’y a pas de règle concernant le volume ni le montant, il existe un faisceau d’indices qui pourrait influencer l’administration fiscale vers une activité professionnelle ou non de ces cessions : votre activité professionnelle par ailleurs, le temps de détention des biens entre leur achat et la vente, les moyens mis en œuvre pour vendre (publicité, création d’un site internet…) En l’occurrence et à la seule lumière des éléments de votre message vous semblez plutôt vous situer sur une opération patrimoniale, non pas sur une activité professionnelle. Mais attention si vous revendez rapidement les biens que vous aurez nouvellement acquis !

  6. Bonjour
    Je me permet de vous exposer un cas particulier : j’achète en tant que collectionneuse particulière des presse-papiers ou boules de Baccarat, Clichy etc. Je désire acheter à un professionnel aux USA
    des boules du XIXeme. Ces antiquités sont-elles taxées à 5 ou à 20% ?
    Merci de votre réponse et bonne journée.
    Cordialement,

    1. Bonjour,
      A priori je dirais que le taux de TVA sera de 20 %, sauf à démontrer qu’il s’agit d’un objet d’antiquité ayant plus de cent ans d’âge !

  7. Fondation et don d'oeuvre d'art
    Une fondation peut-elle bénéficier d’un don d’oeuvres sans condition ? Qui fixe le prix ? Et dans le cas d’un plasticien amateur ?
    Par avance, tous nos remerciements.

    1. Une fondation peut recevoir des dons en nature, en numéraire, en compétence. Par définition le don est gratuit cela signifie que le donateur ne doit pas recevoir de la part de La fondation une contrepartie équivalente au montant de son don. Néanmoins une tolérance de 25 % est admise. Exemple pour une œuvre donnée qui vaudrait 100 euros : la fondation peut vous accorder un avantage de 25 euros. Le don doit donc être valorisé ; il faut déterminer la valeur de l’œuvre… même si l’artiste est un amateur. C’est au donateur qu’il appartient de fixer la valeur du don. En échange La fondation remet au donateur un reçu fiscal qui permet à ce dernier de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu de 66% du montant du don.

  8. Taxe forfaitaire + impôts?
    Bonjour Maitre,

    Je m’apprête à mettre en vente une oeuvre d’art qui m’a été transmise par ma famille il y a environ 25 ans ( je ne peux pas le prouver, car je n’ai aucun justificatif). L’objet doit être confié à une maison spécialisée dans la vente aux enchères. J’ai connaissance de la taxe forfaitaire de 6,5% que je devrais acquitter à l’état mais je voulais savoir quel(s) autres impôts peut/peuvent s’appliquer par la suite? Et à quel taux, sachant que je ne suis pas imposable sur l’année 2016 et que je suis en formation professionnelle jusqu’en 2019.
    Je vous remercie de bien vouloir m’éclairer sur ce que je vais devoir à l’état en cas de vente, je n’ai aucune connaissance dans le domaine et la fiscalité du marché de l’art…
    Merci d’avance pour vos précieux conseils.
    Bien à vous,

    MP

    1. Bonjour,
      Au delà de 22 ans de détention l’oeuvre d’art est exonérée de plus-value ; n’avez vous vraiment aucun élément de preuve que vous possédez cette oeuvre depuis plus de 22 ans (assurance, photo, expertise, courrier, mail) ?
      A défaut de pouvoir établir la date de possession du bien, c’est bien la taxation forfaitaire qui va s’appliquer de 6,5 % ; vous ne pourrez opter pour le régime de la plus-value soumise au taux de 34,5 % (peu importe que vous ne soyez pas imposable par ailleurs). Ensuite l’argent que vous percevrez de la cession pourra être placé et vous serez imposés en fonction de la nature des placements réalisés. Éventuellement et si votre patrimoine net est supérieur à 1 300 000 EUR (et sous réserve du maintien de cet impôt en l’état actuel pour l’an prochain) cette somme entrera dans la base taxable de l’ISF puisqu’il ne s’agit plus d’une oeuvre d’art exonérée.

      1. Vente directe entre particuliers ?
        La vente directe entre particuliers est elle concernée par la taxe forfaitaire de 6,5 % ?

        1. Bonjour,
          Même entre particuliers la taxe est due, sinon c’est une imposition de 34,5 % sur le montant de la plus-value.

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